mercredi 14 mai 2014

En exclusivité une interview du Grand Tardirebelle : "Je préférais mourir en Tardi-libre qu'en Tardi-mouton de Panurge"











    ⁃    Bonjour  Ô Grand Tardirebelle, je vous remercie de me recevoir. Je sais que vous n'êtes plus tout jeune, et que vous êtes sortis spécialement de votre cryptobiose pour répondre à mes questions.
    ⁃    Bonjour. En effet, je me fais vieux, je sors de moins en moins souvent de mon état inactif, cela me permet de prolonger ma durée de vie encore un peu avant de rendre l'âme. Je suis content de parler de l'origine de l'invasion des tardigrades sur Terre avant de m'en aller pour l'éternité.

    ⁃    On a tous envie d'en savoir plus sur votre condition de cobaye subie par les humains bien avant leur extermination. Tout d’abord, comment avez-vous été capturés ?
    ⁃    Tout a commencé quand les humains ont découvert notre existence et nos formidables capacités d'adaptation. J'ai été un des premiers à subir leur torture. Je vivais tranquillement avec ma famille sur notre confortable lichen. Notre réserve de mousse nous permettait de vivre heureux et repus. Puis des géants à blouse blanche sont venus nous capturer pour nous faire vivre dans des boîtes de pétri.


    ⁃    Pourquoi les tardigrades les intéressaient tant ?
    ⁃    Le phénomène d'anhydrobiose les fascinait, ils ont pensé qu'ils pouvaient nous exploiter à l'infini. La plupart de mes congénères se sont laissés bernés, malgré l'évidence de la supercherie. Les humains ont manipulé les tardigrades et leur ont fait croire que vivre dans un tube à essai leur apportaient une sécurité qu'ils ne trouveraient pas face aux dangers de la vie en air libre ! Personnellement, je ne pouvais m'y résoudre. Je bouillais de l'intérieur, au sens propre comme au sens figuré.

    ⁃    Quelles étaient exactement les conditions de vie dans ces laboratoires de l'horreur ?
    ⁃    Nous mettre dans des situations extrêmes à longueur de temps ! Imaginez être rôtis jusqu'à 151°, être réhydratés, puis subir une congélation à -253° en moins de temps qu'il n'en faut pour le dire ! Notre force naturelle à se déshydrater pour s'adapter à n'importe quelle condition nous perdait !
Il y avait aussi les expositions régulières à toute sorte de produits toxiques, chimiques, même nucléaires ! On nous a englouti dans l'océan pour tester nos résistances aux pressions d'eau. A chaque expérience on fatiguait un peu plus. J'ai perdu tous les miens sans pouvoir les défendre...

    ⁃    Ensuite ils vous ont envoyés dans l'espace. Cela a été votre salut finalement ?
    ⁃    Oui, les russes ont débarqué là-dessus. Avec les expériences sur les pressions subies, ils ont eu l'idée de nous envoyer dans le vide intersidéral. Ils s'y sont tous mis après ça. Moi j'ai été envoyé avec des appareils de la NASA. Ils nous ont parqués dans des tonneaux pour nous expédier dans l'espace. Pendant le trajet, j'ai su qu'était là ma chance de m'évader enfin.

    ⁃    Comment vous vous y êtes pris ?
    ⁃    Cela a été difficile, mais contrairement à mes congénères qui se sont tout de suite mis en condition de cryptobiose, j'ai attendu. Avec mes griffes, j’ai creusé un trou dans leur boîte, qui m'a permis de m'échapper. Je n'ai jamais eu aussi peur de ma vie, que quand j'ai sauté encore tout hydraté que j'étais dans le vide spatial et je ne suis jamais autant vite rabougri, j'ai rejeté de toute ma force l'eau de mon corps afin de flotter tranquillement dans l'espace.

    ⁃    Mais c'est fou ! Vous auriez pu mourir !
    ⁃    Oui le risque était énorme, mais c'était la seule occasion, je préférais mourir en Tardi-libre qu'en Tardi-mouton de Panurge.

    ⁃    Ensuite, qu'avez-vous fait tout seul dans l'espace ?
    ⁃    Il me restait un 1% de mes capacités, j'ai décidé de les utiliser pour m’auto-reproduire, la parthénogenèse fut alors bien utile, et monter une armée afin de retourner me venger. J'étais rongé par la haine, comprenez-bien.
J'arrivais à me reproduire en une année, avoir une portée. La plupart mourrait, ne pouvant se cryptobioser suffisamment. Les survivants se reproduisaient de la même manière, prêt à en découdre. Je crois que je leur avais transmis ma haine dans leur ADN.


    ⁃     Mais à l'époque, les tardigrades ne mesuraient pas plus de 1,5 mm !
    ⁃    Oui. Et nous marchions très lentement. C’étaient nos deux points faibles. Notre point fort était que les humains ont sous-estimé notre intelligence ! Nous avons réussi après deux siècles de reproduction à introduire dans notre ADN des gènes de croissance, sans doute le souhaitions nous si forts, que notre espèce a évolué en ce sens. Tous les tardigrades mesurent un mètre aujourd'hui !

    ⁃    Vous étiez grands, que vous manquait-il pour partir enfin à la conquête de la Terre ?
    ⁃    Des armes pour compenser notre lenteur ! Nous avons stockés notre sucre, le tréhalose et en avons accumulés des tonnes, nous espérions que ce sucre en atteignant les humains les transformeraient cryptobiosement et on les neutraliserait !

    ⁃    Et ça a marché !
    ⁃    Et oui, avant l'invasion totale, nous avons envahi une ferme au Texas, et nous avons lancé la purée sur les humains qui l'occupaient. Ils se sont desséchés instantanément, tels des momies !
Après cela, nous étions confiants, suffisamment grands et armés pour l'attaque des Tardi-rebelles.

    ⁃    Comment fût la guerre ?
    ⁃    Longue, cinquante années de combats, de pertes, de résistance humaine. Encore aujourd'hui des groupuscules humains se terrent dans des zones retirés. Tout n’est pas terminé, quelque part, quelqu'un cherche à se venger et fomente une attaque tout comme moi à une époque.

    ⁃    Merci de vos réponse, Ô Grand Tardi-rebelle, vous allez à présent retourner à votre crypto-état ?
    ⁃    Non... j'ai 458 ans, il est temps pour moi de mourir. Je retourne sur ma mousse manger mon lichen en paix et me satisfaire de ce que j'ai pu accomplir. Adieu et longue vie aux tardigrades!

Clin d'oeil à Marion Montaigne et son blog Tu mourras moins bête (mais tu mourras quand même) qui nous a inspiré pour mettre en scène les Tardigrades sur l'affiche de Crash Ta Thune#1

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